« Faut pas prendre les cons pour des gens » : interview d’Emmanuel Reuzé et Nicolas Rouhaud à Quai des Bulles


Ecrit par McR le 28 novembre 2019

Le monde va de travers, ça on le savait. Mais dans « Faut pas prendre les cons pour des gens », Emmanuel Reuzé et Nicolas Rouhaud en rajoutent une couche : les parties de pétanque assistées par satellite,  les grandes surfaces dont les salariés sont les clients, les diplômes à acheter au distributeur… Tout y passe ! Cela déménage, c’est frais… et tellement vrai !

Lors du festival Quai des Bulles, nous avons eu le plaisir de rencontrer ce duo.  Emmanuel travaille pour Fluide Glacial depuis dix ans et Nicolas s’est associé à lui pour le dernier album. Les deux rennais se voient souvent et décident de collaborer pour cet album, après avoir déjà travaillé ensemble sur « Gare ! la moustache au poitrail ».

Comment est né ce projet ?

ER : J’ai fait 5 ou 6 pages que j’ai passé à Fluide et ils étaient assez intéressés. Les délais étaient courts, j’ai proposé à Nicolas de faire les scénarios ensemble.

Vous êtes donc montés tous les deux au créneau de la BD absurde.

ER : Oui c’est plus efficace d’être ensemble, c’est du ping pong ! C’est plus rapide que par mail ou via facebook. Dans ce style de BD, cela arrive que l’on soit rattrapé par l’absurdité du monde. Par exemple, à propos de la violence dans les écoles aux États-Unis, quand Trump a proposé de fournir des armes aux enseignants. L’idée de départ est de partir sur toutes mes bêtes noires, ce que l’on voit dans la société aujourd’hui – il y a pas mal d’histoire sur les SDF, le monde du travail, les suicides, …

NR : Les SDF et les migrants reviennent plusieurs fois. Il y a par exemple cette histoire évoquant la ville construite par les migrants sur un rocher…. pour que les migrants en question ne puissent pas y monter ! Certaines planches étaient déjà passées dans le « Psikopat » et dans « L’écho des savanes ». J’avais essayé de faire différents plans. Mais cette fois, les gens sont figés, amorphes. Nous avons beaucoup plus de gags, nous sommes même parfois obligés d’en virer ! Les dessins uniques permettent de faire une déclinaison sur un concept, comme nous sommes limités à six cases. L’immobilité des personnages démontre leur incapacité à bouger et à évoluer. Ils sont bloqués dans une situation totalement absurde.

Cela vous fait encore marrer de relire votre album ?

ER : Je connais trop les blagues pour en rire !

NR : Je ne relis pas mes albums.

Les thèmes abordés sont très variés.

ER : Dans la vie actuelle, nous assistons tous les jours à beaucoup de choses improbables : les enfants qui collectionnent les images de cancer sur les paquets de tabac, les SDF qui sont promenés devant les immeubles, la rentabilité des diplômes, les caisses de supermarchés en libre service… Pour les caisses de supermarchés justement, nous avons repris le concept actuel : c’est un métier pénible, donc le client fait le boulot à la place de la caissière qui en réalité n’a plus de travail… Nous avons simplement poussé l’idée jusqu’au bout : à la fin, c’est vraiment au client de tout faire !

NR : Nous sommes vraiment dans la satyre, il y a certaines scènes qui sont connectées avec la réalité, et d’autres qui sont complétement barrées.

Combien de temps cela vous a pris pour faire cet album ?

ER : Cela a pris six mois. J’avais commencé seul et j’ai fini fin juin avec Nico. On travaille beaucoup plus le scénario que le dessin, contrairement à ce que je peux faire d’habitude.

 

Comment est née la couverture ?

ER : Nous avions besoin d’une couverture assez rapidement. On m’a demandé d envoyer les visuels. J’ai envoyé des images simples, et cela fonctionnait bien. Fluide Glacial voulait la mettre dès le début donc on a cherché plein d’autres histoire en quatre cases, et finalement l’éditeur les a mises en couverture

D’où vient le titre ?

ER : J’aime le films italiens des années 60. L’idée était de partir de cela. J’avais d’abord appelé l’album « Les monstres ». Puis un pote est passé chez moi, on discutait de politique et une expression est souvent revenue souvent dans sa bouche : « Faut pas prendre les cons pour des gens ». Ma copine me dit « Tu as entendu ce qu’il vient de dire ? ». Et voilà ! J’aime cette expression car elle regroupe l’humour noir et l’absurde.

Un deuxième tome est en préparation. On se lèche d’avance les babines !

Je terminerai par quelques citations :

« J’ai trop lu, je n’aurais pas du reprendre du Reuzé, c’est un peu lourd ! »

« Tu ne veux pas du Goosens pour digérer ? »

C’est génial, merci pour cette découverte… et pour la dédicace !

 



En bref

Série en cours (1 tome paru)
Une BD de : Emmanuel Reuzé et Nicolas Rouhaud
Édition : Fluide Glacial



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McR

McR a est un homme barbu mais pas méchant. Il a connu la préhistoire, et grâce à un accélérateur de particules, il a pu rejoindre la communauté.

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