Ecrit par BennyB le 15 novembre 2019
Lors du festival Quai des Bulles à Saint-Malo, nous avons rencontré Vincent Normand. Sa nouvelle BD « Ampère » vient juste d’être publiée chez « L’Œuf », une maison d’édition indépendante rennaise que nous aimons beaucoup, et qui propose tout un catalogue de BD hors du commun.
Accompagné également par Lucie QZN, éditrice chez « L’Œuf », nous nous sommes posés autour d’une table, pour qu’il nous parle de cette nouvelle publication !
Bonjour Vincent ! Dans ta nouvelle BD, « Ampère », tu te mets en scène et tu interroges le lecteur sur différents thèmes : la place de chacun dans la société, sur ce qui est considéré comme « normal » ou non, les pressions sociales, et surtout sur la parentalité.
Cette BD a été initialement créée il y a un an lors des 24 heures de la BD à Cairon en Normandie. Il fallait réaliser une BD en 24 planches, en 24 heures, sur le thème de « l’interrupteur qui allume la vie ». Lucie QZN, graphiste et éditrice, m’a conseillé de proposer cette BD aux éditions « L’Œuf » où elle travaille, et m’a accompagné tout le long du projet. Dans ce cadre, nous avons donc pu retravailler et étoffer cet album. Cela nous a permis de proposer un chapitre supplémentaire, ainsi que des chapitrages.
En effet, c’est auto-biographique, mais pas seulement. Ce sont des questions très ouvertes sur la parentalité. J’utilise mon expérience pour généraliser à des injonctions que tout le monde a déjà subi.
Lors des 24 heures de la BD, j’ai sorti le récit « à chaud », car je m’étais séparé de mon ex-copine. Le fait de retravailler cette histoire un an plus tard m’a permis de prendre du recul. Lucie m’a apporté des pistes pour améliorer la narration, la compréhension des idées, les rendre plus universelles…
Au niveau de la forme, tu utilises ton imaginaire pour exprimer des idées. Par exemple avec la vie parentale représentée comme un parc tout calme ou une mer agitée…
Des gens ont trouvé cela rigolo et gentil, et en même temps c’est assez violent : le personnage n’arrête pas de se faire découper, tronçonner, brûler… car les idées exprimées sont violentes. L’idée était de faire des illustrations qui complètent le texte, pas seulement illustrer les idées au premier degré. Cela donne de la force aux idées exprimées.
Le choix des couleurs est très fort aussi : tu utilises 4 couleurs, et tu es souvent représenté en jaune.
Pendant les 24 heures de la BD, j’ai utilisé un crayon noir et trois feutres : un jaune, un rose et un bleu. Quand nous avons adapté cela en album, j’ai décidé de conserver cette contrainte. Par contre, pour les chapitrages, j’ai choisi de l’aquarelle pour changer un peu, et pour marquer une rupture dans le récit. Les chapitrages racontent une autre histoire qui se croise avec l’histoire principale.
La relation à la mort est également abordée à la fin.
Oui, il y a ce personnage du bébé mort. Il pourrait être mon frère ou ma sœur, qui n’est pas né·e suite à la fausse couche de ma mère. C’est une projection du bébé que je n’ai pas eu, que je n’aurai peut-être pas. C’est très métaphorique également.
Ce qui est agréable aussi dans cette BD, c’est que rien n’est ni tout noir, ni tout blanc. Tu évoques la pression sociale sur les adultes qui n’ont pas d’enfant, mais d’un autre coté tu expliques que ne pas en avoir, c’est bien aussi, c’est juste un autre choix de vie.
Exactement. Ce n’est pas être égoïste de ne pas avoir d’enfant. On peut aussi vivre sans enfant sans forcément culpabiliser. La question est d’assumer ces choix là. Le but de l’existence est avant tout d’être heureux. On peut l’être avec des enfants, comme on peut l’être sans en avoir, ou dans une relation libre, marié ou non, propriétaire ou non, …
Il faut se débarrasser de tout ce qu’on nous a mis dans le crâne, par le biais de la télévision, la publicité, les journaux… tous ceux qui veulent nous faire croire qu’il n’y a qu’une façon d’être heureux. Dans cette histoire, je ne dis pas non plus ce qui est bien ou non. A chacun de trouver sa propre voie pour être heureux.
Cette pression sociale sur la parentalité est d’ailleurs plus souvent exprimée par les femmes, à cause de l’horloge biologique. Je trouve cela bien que ce soit un homme qui en parle. Mais ce sont des questions qui s’adressent autant aux hommes qu’aux femmes.
Je suis tombé sur une citation anonyme l’autre jour :
« Ceux qui pensent que c’est impossible sont priés de ne pas déranger ceux qui essaient. »
C’est tellement vrai. Je pense qu’il faut essayer des choses, même si ça foire, on peut tout imaginer et tout créer.
L’album est déjà sorti ? Avez-vous déjà eu des retours ?
Il sort ce week-end pour le festival Quai des Bulles, un an après les 24 heures de la BD, aux éditions rennaises « L’Œuf ».
Nous l’avons présenté en avant-première lors des Portes Ouvertes des Ateliers de la ville de Rennes. Nous avons eu quelques retours très forts. Les lecteurs s’approprient très vite ces questions de la paternité, car ce qui est raconté fait écho à leur propre expérience. Tout comme sur les autres thèmes abordés : la société de consommation, la pression sociale qu’on nous impose…
Les discussions que nous avons eues avec eux étaient très agréables.
Quelles sont les autres actualités chez « L’Œuf » en ce moment ?
Notre amie Mandragore a lancé une campagne de financement participatif pour sa nouvelle BD qui s’intitule « Mandragore », justement ! Il s’agit d’une adaptation d’un roman fantastique de H.H. Ewers, c’est un super projet qu’il faut soutenir !
https://www.kisskissbankbank.com/fr/projects/bd-mandragore
Merci pour la dédicace !
Le site de Vincent Normand : http://vincentnormand.fr/
Le site de « L’Oeuf » : http://www.editions-loeuf.com/
En bref
1 one-shot
Une BD de : Vincent Normand
Édition : L'Œuf
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BennyB
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