« Super Pixel Boy » : interview de Loïc Clément à Quai des Bulles


Ecrit par BennyB le 20 novembre 2023

Si vous avez grandi dans les années 80, vous avez probablement joué aux jeux vidéo sur GameBoy, consoles de salon ou bornes d’arcade. Loïc Clément et Boris Mirroir nous racontent avec tendresse cette époque.

Dans les deux tomes de « Super Pixel Boy », ils mélangent analyses de jeux rétro et anecdotes de leur enfance.

Nous avons eu la chance de rencontrer le scénariste Loïc Clément, qui nous parle de jeux vidéo, de pop culture et des années 80 !

 

Quels ont été les retours sur le premier tome ?

Je trouve qu’il est passé assez inaperçu, mais les échanges ont été riches avec les personnes qui l’ont lu. Le dessinateur Boris Mirroir et moi-même avons constaté un phénomène assez étonnant. Des parents venaient nous voir en dédicace avec leurs enfants. Nous pensions faire une dédicace pour les parents, mais c’était pour les enfants ! Pourtant, ils ne sont pas du tout de cette époque-là. Il y a un lien inter-générationnel assez fort.

La pop-culture prend tellement de place aujourd’hui qu’on se rend compte que les références des années 80 ont traversé les générations. Mario, les Tortues Ninja ou Batman sont toujours présents dans l’actualité. Même le « Pixel art » fait partie de la culture.

 

Auto-fiction et jeux vidéo

Dans les deux tomes, tu fais un parallèle entre les jeux vidéo de ton enfance et ton autobiographie : les copains, les histoires d’amour…

C’est de l’auto-fiction. Je ne suis pas braqué sur mes souvenirs. Je les romance pour les rendre plus intéressants. C’est drôle car j’ai retrouvé des copains en dédicace, dont je parle dans les albums !

 

Comment t’y prends-tu pour rattacher les anecdotes de ta vie et les jeux vidéo ?

J’établis la liste de mes jeux préférés de l’époque, qui sont encore dans ma vidéothèque. J’essaie de mettre en face de chaque jeu les mots que cela m’évoque : premier amour, dispute avec mon frère, mes parents, etc. J’essaie de voir si une thématique se dégage. Il faut trouver l’équilibre dans tout ça !

 

Nostalgie

J’ai beaucoup apprécié l’humour dans ces albums. Tu fais parler les héros de jeux vidéo dans leurs écrans de jeu. C’est un humour assez féroce, voire politiquement incorrect…

Tout à fait ! Cette histoire se situe dans les années 80, époque à laquelle nous étions continuellement confrontés à ce type d’humour. Il suffisait d’allumer la télévision pour tomber sur les émissions de Stéphane Collaro avec des femmes à poil en pleine journée sur TF1. Il n’y avait pas d’avertissements comme aujourd’hui, même si je ne dis pas qu’ils ne sont pas nécessaires. Par exemple, mon grand-père me faisait regarder des films d’horreur sans se poser de questions.

Dans « Super Pixel Boy », on a voulu retranscrire l’état d’esprit de cette époque. Au-delà de l’humour parfois outrancier, il y avait aussi une liberté, qui pouvait être quelques fois dangereuse. A 8 ans, on me laissait seul à la maison toute la journée. Cela ne nous viendrait pas à l’esprit aujourd’hui !

 

J’ai été impressionné par ces cases où Boris a redessiné entièrement les écrans de jeux vidéo, ainsi que les pochettes de jeux.

Absolument ! Contrairement à ce qu’on a pu dire, ce ne sont pas des captures d’écran. Tout est dessiné et réinterprété à la main, pixel par pixel. Les pochettes de jeux étaient importantes à l’époque car on n’avait pas Internet, donc on était obligés de se fier à la jaquette. Et parfois le graphisme du jeu n’avait rien à voir…

 

Retour vers le futur

Dans le tome 2, il y a aussi un voyage dans le temps, avec l’apparition du personnage de Gros Pixel !

Oui, Gros Pixel c’est moi, venu du futur ! Dans le tome 1, on a fait exprès de laisser une erreur. Quand Boris a dessiné cette chambre du copain de Pixel, il y a un poster de Son Goku adulte, personnage qui n’est pas encore apparu au Club Dorothée en 1988. C’était un anachronisme que nous avons volontairement laissé, pour nous permettre de faire dans le tome 2 un voyage dans le temps, dans le but de le corriger.

J’ai aussi profité de cette histoire de voyage temporel pour propulser le héros à la période du collège et des consoles 16 bits. C’est un subterfuge scénaristique qui m’a permis de gagner quelques années.

 

J’ai été très ému de voir des écrans du jeu « Another World », sans qu’il ne soit nommé. Pourquoi ce choix ?

Merci ! C’est un des seuls jeux qui apparaît sans être nommé. Il m’inspire depuis que je suis scénariste de BD. On trouve énormément de clins d’œil à ce jeu dans mes albums. On a demandé au créateur du jeu Éric Chahi de faire la préface du livre. Il a refusé car c’est quelqu’un d’assez discret. Il a émis l’idée de voir le résultat, il faut que je lui envoie le tome 2 ! On me parle beaucoup de lui, je me demande s’il réalise à quel point il a marqué toute une génération.

 

Les jeux vidéo, c’est la vie !

Vous n’avez pas eu de souci par rapport aux droits d’auteurs ?

Comme tu l’as remarqué toi-même, chaque fois qu’on montre un écran de jeu de vidéo, on fait parler le héros et il y a des blagounettes. On est donc dans l’exception française qui est le droit à la parodie.

 

Vous travaillez à distance avec le dessinateur Boris Mirroir ?

Oui, c’est d’une limpidité incroyable. C’est une personne avec qui c’est le plus simple de travailler. Il intervient aussi sur l’écriture. On peut passer beaucoup de temps à trouver la punchline parfaite. On est bosseurs et on s’est bien trouvés là-dessus !

 

Vers l’infini, et au-delà !

Un troisième tome est en préparation ?

Je travaille actuellement sur le scénario. Je suis très satisfait du deuxième tome, à la fois sur la qualité et sur le rythme de croisière qu’il a su trouver. Je cherche comment démarrer le tome 3 et rester à ce niveau.

 

Tu as d’autres projets en parallèle ?

J’ai un grand nombre de séries en cours chez différents éditeurs. Je travaille beaucoup, mais c’est un métier qui me passionne !

C’est drôle car un jeu GameBoy inspiré de notre BD est sorti en même temps que le tome 2. Les propriétaires des vieilles GameBoy peuvent se procurer la cartouche de jeu. Il a été développé par Johnny Humberset. C’est un goodies assez sympa !

 

 



En bref

Série en cours (2 tome parus)
Une BD de : Loïc Clément et Boris Mirroir
Édition : Delcourt


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BennyB

Co-fondateur de la Loutre Masquée, il est né en 1743, un samedi. Son but dans la vie : rendre le monde meilleur, avec des sites internet à base de loutres. Et il trouve que Spirou a vachement plus la classe que Tintin, quand même.

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