Ecrit par BennyB le 27 novembre 2024
En adaptant le roman de Flore Vesco, Mayalen Goust nous dévoile un conte terrifiant au graphisme délicat et envoûtant, qui sait aussi évoquer des sujets importants.
Nous l’avons rencontrée au festival Quai des Bulles, où elle nous dévoile les coulisses de cet album majestueux !
Bonjour ! “D’or et d’oreillers” est une adaptation d’un roman de Flore Vesco. Qu’est-ce qui vous a donné envie d’adapter ce roman ?
J’ai d’abord été contactée pour réaliser l’illustration de couverture du roman. Je ne connaissais pas du tout le travail de Flore Vesco à ce moment-là. Quand j’ai lu son histoire, j’ai succombé à son écriture singulière et à son univers complètement fou. J’ai tout de suite vu des images, la couverture m’est apparue de façon évidente. Je me suis dit que cela ferait une excellente BD ou même un dessin animé. J’ai vraiment eu un gros coup de cœur !
Quelques jours plus tard, mon éditrice m’a contactée pour me dire qu’elle avait vu la couverture du roman. Elle m’a demandé si je serais partante pour l’adapter en BD !
Quels plaisirs et quelles difficultés avez-vous rencontré pour adapter ce roman ?
J’ai supprimé des personnages, comme la mère de Sadima. Ou encore certains passages qui, dans le roman, fonctionnent très bien, mais qui ne sont pas indispensables dans la BD. On ne peut pas tout raconter, on a un nombre de pages à respecter. On est obligé de s’adapter au format, comme pour une adaptation en film.
On ne se rend compte des difficultés qu’une fois qu’on commence à travailler dessus. Notamment le château : comment le représenter, donner ce côté humain, organique, émouvant ? J’ai travaillé avec mon mari, qui est également artiste. Il m’a aidé à adapter le scénario, à trouver des idées graphiques. Vu que je n’aime pas trop les perspectives, les trucs très droits, j’ai choisi de partir sur quelque chose d’assez ondulé, de mettre de la rondeur partout.
Justement, il y a des petits indices pour les lecteurs, par exemple une pièce qui ressemble à une bouche.
Tout à fait ! Pour jouer sur le côté organique, je me suis inspirée de planches d’anatomie, des dessins d’époque un peu glauques. Et c’était vraiment une volonté de ma part. Ces indices étaient déjà décrits dans le roman. Elle met aussi des petites allusions sur l’architecture du château, pour laisser entendre que ce n’est pas un château classique.
On découvre le château en même temps que l’héroïne. Je voulais qu’on se sente parfois complètement paumée, comme elle, et qu’on ne comprenne pas trop ce qui se passe.
On est dans un conte de fées très sombre, où de nombreux sujets sont abordés : le droit de disposer de son corps, de faire ses propres choix…
Oui, ces thématiques sont déjà très présentes dans le roman. Flore Vesco s’est vraiment amusée à remodeler les contes, pour faire ressortir ces sujets, qui sont finalement très contemporains. Le consentement à la liberté de disposer de son corps est important, que ce soit pour les femmes ou pour les hommes. J’ai aimé le fait que ce ne soit pas seulement centré sur les femmes. On parle de l’emprise des familles. Le personnage du Lord lui-même est aussi une victime.
Quelle est votre technique de dessin ?
Tout est réalisé sur ordinateur. Cela permet d’avoir des couleurs vraiment éclatantes, chose que je n’aurais pas réussi à faire en traditionnel.
La mise en page est très déstructurée, comme pour coller aux émotions du moment.
Tout à fait. L’histoire est tellement fantastique et onirique que j’avais envie de jouer avec ça. De sortir du cadre classique, de proposer des choses, des grandes double pages, un peu comme ce qu’on retrouve dans les albums jeunesse.
Il y a aussi tout un jeu autour du langage, des palindromes, des chansons…
Oui ! Dans le roman, Sadima a ce petit truc en plus. Elle chante de petites ritournelles. Je ne savais pas trop comment retranscrire graphiquement cela pour la BD. Ce n’était pas évident. On a donc choisi d’intégrer des petites chansons, de changer la typographie, d’ajouter des petites notes en graphisme. On a trouvé des petites astuces pour que les lecteurs comprennent cette idée.
Vos BD précédentes étaient très réalistes, situées dans des contextes historiques forts. J’ai l’impression qu’avec cet album, vous êtes sortie de votre zone de confort ?
Tout à fait. Dans mes précédents projets, je ne pouvais pas trop me lâcher graphiquement. Je devais respecter une époque, une architecture. Alors que là, on n’est pas dans une époque précise, je pouvais inventer tout ce que je voulais. C’était très agréable. Franchement, j’ai pris beaucoup de plaisir à réaliser ça !
Merci Mayalen, et à bientôt !
En bref
Un one-shot
Une BD de : Mayalen Goust
Édition : Rue de Sèvres
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BennyB
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